Sport24 03/01
Qui est Xavier Moreau, l’homme de l'ombre qui fait gagner Tsonga ? - Fil Info - ATP - Tennis
Depuis plusieurs années, cet homme de l’ombre est le préparateur physique de certains des plus grands champions français, dont Amélie Mauresmo et aujourd’hui Jo-Wilfried Tsonga en pleine renaissance.Vainqueur de deux tournois consécutifs sur le circuit ATP (Rotterdam et Marseille), Jo-Wilfried Tsonga, 31 ans, vient de signer son retour dans le top 10 mondial (7e) et respire la grande forme après plusieurs saisons durant lesquelles son physique l’a souvent trahi. Sous la houlette, de son coach, Thierry Ascione, mais également de son préparateur physique, Xavier Moreau, le Français a entrepris un travail de fond pour retrouver son meilleur niveau. « Au-delà de sa bonne humeur et de sa patience, Xavier (Moreau) m’apporte de la compétence », confie au Figaro Jo-Wilfried Tsonga.Rencontré en décembre dernier au Centre national d’entraînement (CNE) de la porte Molitor, à Paris, Xavier Moreau a peaufiné la préparation du numéro un français. Au menu, séances légères de réveil musculaire (vélo, élastique pour les bras, exercices légers avec haltères), séances dures axées sur la vitesse, l’endurance ou le travail musculaire (levées de barres lestées d’une charge de 95 kg), sans oublier les séances de transition (footing, abdos-gainage). « La priorité, c’est que Jo exprime ses qualités physiques dans son tennis, nous glissait-il. Le bilan physique que l’on fait chaque d’année nous donne les orientations d’entraînement. On travaille sur son explosivité. Elle dépend de la force. »Et le Manceau, sous la houlette de Moreau, n’a pas hésité plusieurs fois à mettre les gants de boxe. Pas pour imiter le regretté Mohamed Ali, l’une de ses idoles, mais bien pour améliorer son tennis. Xavier Moreau, 49 ans, boxeur de formation, a souvent demandé à ses joueurs ou joueuses d’enfiler les gants. « Le tennis, c’est un sport de combat avec une balle jaune. Pour Jo, j’ai utilisé la boxe pour une problématique d’appuis. Dans un exercice de ring imaginaire, l’idée est qu’il envoie dans mes gants des parpaings à transformer ensuite en missiles sur le court. »« Je suis un homme de l’ombre qui aime bien rester dans l’ombre », ajoute Moreau. Mais sans lui, point de lumière. Au service des champions français depuis une quinzaine d’années. Préparateur physique à la FFT de 2000 à 2005, il a notamment travaillé avec Amélie Mauresmo (2001-2009), Mary Pierce (2004-2006) et l’équipe de France de Fed Cup (2001-2006), puis à nouveau de 2012 à 2016. Il a retrouvé les Bleus de Yannick Noah en Coupe Davis l’année dernière et travaille également avec Kristina Mladenovic. Avec lui, Mauresmo a cessé de se blesser régulièrement, remporté deux tournois du Grand Chelem et atteint la première place mondiale. « Il faut avoir beaucoup d’humilité à propos de notre contribution aux réussites ou aux échecs des sportifs. Une certitude : je n’ai pas empêché un athlète de réussir. Le physique n’est qu’un moyen pour parvenir au sommet. Le chef d’orchestre, c’est l’entraîneur tennis. C’est lui qui oriente les stratégies de jeu. Mon rôle est de donner des informations objectives sur la condition physique du joueur et de s’extraire de la dictature des résultats immédiats pour se projeter à moyen terme. »Travail, le maître mot. Xavier Moreau est bien placé pour évoquer l’évolution du tennis de haut niveau. « Les joueurs qui réussissent aujourd’hui sont des bêtes de boulot. Avec des volumes d’entraînement et des hygiènes de vie de plus en plus sévères pour supporter les charges d’entraînement. Le talent ne suffit plus. » Terminé, le triptyque préparation foncière-entraînement tennis-compétition.« Aujourd’hui les qualités physiques doivent être entretenues tout au long de l’année. Même en tournoi, les joueurs font désormais de la musculation. Ce sont comme des F1 avec une armada autour d’eux. J’ai passé 24 semaines avec Jo en 2016, et Michel Franco (kiné de Tsonga, NDLR) voyage encore plus. » Et quand il n’accompagne pas ses athlètes sur le circuit, Moreau offre ses compétences aux équipes de France.Élevé et formé au Blanc-Mesnil, ce professeur de gym et athlète de 1 500 m de bon niveau n’était pas prédestiné à côtoyer les champions du tennis. Jusqu’à ce qu’il croise sur sa route un certain Nick Bollettieri en 1986. Ce dernier voulait alors créer une académie en France, dans les Yvelines, à Plaisir, où Moreau travaillait dans une salle de sport pour financer ses études. Le prof de banlieue s’est envolé pour Bradenton, en Floride, où il a appris sur le tas auprès des meilleurs cadres techniques. « Ce qui m’a marqué, c’est moins l’expertise technique que la mentalitéà tout voir en positif. » Car le préparateur physique peut se muer en préparateur mental…Farouche partisan des plages de repos, Moreau loue la rationalité d’un Andy Murray dans sa programmation. « Il construit de façon très rationnelle son calendrier avec ses compétitions, ses phases de repos et de récupération. Le défaut, c’est quand le calendrier des compétitions fait office de programmation. »Car à force de courir… « Les sportifs de haut niveau peuvent pousser très loin la machine, mais quand on n’a pas récupéré et que l’on n’a pas aménagé de temps de repos et de récupération, on est rattrapé par la blessure. »En 2005, Moreau était devenu directeur général du team Lagardère avec une approche rigoureuse et scientifique. Fort de l’appui des technologies modernes offrant de nouvelles possibilités d’analyse du mouvement, l’idée était de « replacer les dimensions technique et tactique au cœur du modèle plutôt que seulement les capacités énergétiques et musculaires ». Histoire de balayer les suspicions fondées ou infondées sur les performances des meilleurs. « Amélie Mauresmo a été numéro un mondiale pendant un an sans prendre de saloperies. On suspecte toujours au moment où l’athlète arrive au sommet. » Histoire de rappeler également que sans le préparateur physique, point de champion.